POUR UNE PREMIERE APPROCHE DE L'APPEL D'ABRAHAM
Ce texte très court est immensément célèbre. En quelques versets il dit l'appel et le départ d'Abraham (appelé ici Abram, son nom ne changera qu'après) sur la promesse et la bénédiction de Dieu. Les croyants voient dans la foi et l'obéissance d'Abraham à la parole de Dieu l'acte fondateur d'Israël. Nous regarderons comment il fonctionne, ce qui est mis en valeur et ce qui est plus étranger : cela peut nous aider à comprendre comment lire la Bible.
Première lecture
Ce texte met principalement en scène une parole - celle de Dieu à Abraham -, puis un voyage en réponse à cette parole. Elle surprend pourtant parce que, jusqu'ici, le texte a à peine mentionné Abram. Il s'est contenté de dire ceci : "Térah engendra Abram... Abram et Nahor prirent des femmes ; le nom de la femme d'Abram était Saraï... Saraï était stérile, elle n'avait pas d'enfant. Térah prit Abram, son fils, et Lot, fils d'Haran, fils de son fils, et Saraï, sa belle-fille, femme d'Abram, son fils. ls sortirent ensemble d'Ur en Chaldée, pour aller au pays de Canaan. Ils vinrent jusqu'à Haran, et ils y habitèrent." (Gn 11,27-31).
Le caractère surprenant de ce début abrupt doit nous inciter à nous demander ce que le texte veut mettre en valeur ainsi. Puisque c'est sur la parole de Dieu qu'Abram part, il est bon de l'examiner en étant attentifs à ses points d'insistance.
La parole de Dieu
Elle met en valeur deux éléments :
- L'ordre de départ est total : il s'agit de tout quitter : pays, famille et maison familiale, pour partir dans un pays inconnu. Il serait difficile de concevoir un arrachement plus radical.
- La place proéminente des promesses : elles occupent les versets 2 et 3, soit la plus grande partie de la parole de Dieu, ce qui est dire l'importance qui leur est donnée.
L'insistance sur le caractère radical du départ: dans la suite du texte, d'autres notations appuient son caractère radical : l'âge d'Abram, 75 ans, rend encore plus surprenant son départ et le met donc en valeur. Une autre notation : "il prit sa femme, son neveu, tous ses biens et ses serviteurs" , nous indique combien sa décision est résolue, entière et sans retour possible.
Les promesses de Dieu : clairement, elles dépassent Abram, dès la première : "Je ferai de toi une grande nation... en toi seront bénies toutes les familles de la terre". Cette promesse est à dimension universelle, concernant aussi toute la descendance d'Abraham. Plus loin, au v. 7, elle est accompagnée d'une promesse de terre.
Le texte de Gn 12,1-9 ne se limite pas à ces quelques notations, mais la façon dont il les met en valeur - soit par leur ampleur, soit par la place qu'elles occupent dans le texte - proclame que c'est d'abord elles qui sont significatives pour une bonne lecture du texte.
Après cette première lecture...
Deux remarques :
- Il n'est pas étonnant que les croyants juifs et chrétiens aient considéré ce texte comme fondateur. Il n'est pas ici seulement question d'Abraham, mais d'une annonce qui concerne "toutes les familles de la terre", c'est-à-dire nous tous. Clairement, l'ordre du Seigneur et le départ d'Abraham sont fondateurs pour toute sa descendance, toutes les familles de la terre, selon les auteurs bibliques.
- Dans ce contexte, ce qui domine est la bénédiction du Seigneur qui s'adresse à Abram et à nous tous, puisque le texte assimile clairement "toutes les familles de la terre" à cette descendance. En aucun cas, la malédiction prononcée au verset 3 n'acquiert la même impportance.
Au terme de cette première lecture, peut-être pouvons-nous aussi mieux sentir comment le texte lui-même nous guide pour nous aider à découvrir ce à quoi il veut que nous accordions le plus d'importance.
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