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Livre de la Genèse
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Le cycle d'Abraham : Alliance et descendance d'Abraham et Sarah
Genèse 16,1-17,27

Ces textes peuvent nous scandaliser : comment penser qu'ils soient appelés Parole de Dieu ?

Et pourtant ils le sont. Cela interroge d’abord la qualité de notre regard : sommes-nous capables de les écouter, de les lire sans immédiatement projeter sur eux ce que nous vivons et notre réalité ? Ou bien sommes-nous tant envahis par ce que nous sommes que nous ne serions pas libres de les accueillir tels qu’ils sont ? En fait, ils sont aussi un test, mais de notre capacité d’ « écoute » avant tout.

Cependant, leur existence atteste aussi que la conscience de l’homme et de la femme s’est interrogée peu à peu sur ses pratiques, les revisitant dans le sens d’une plus grande compréhension de ce qui fait la grandeur de l’homme et de sa vocation. Un croyant dira que Dieu ne travaille pas en vain le coeur de l’homme et y verra un signe d’espérance : créés à l’image de Dieu, nous allons vers plus de ressemblance et nos lois - sinon nos moeurs - en témoignent.

C’est dans cette dynamique que le croyant veut relire les textes bibliques : pour y percevoir de mieux en mieux le projet de Dieu d’apporter le salut aux hommes, pour y percevoir comment ceux-ci peuvent répondre à cette offre, à cette proposition d’Alliance.

161  Saraï, femme d'Abram, ne lui avait point donné d'enfants. Elle avait une servante Égyptienne, nommée Agar. 2 Et Saraï dit à Abram:

Voici, le SEIGNEUR m'a rendue stérile; viens, je te prie, vers ma servante; peut-être aurai-je par elle des enfants.
Abram écouta la voix de Saraï. 3 Alors Saraï, femme d'Abram, prit Agar, l'Égyptienne, sa servante, et la donna pour femme à Abram, son mari, après qu'Abram eut habité dix années dans le pays de Canaan. 4  Il alla vers Agar, et elle devint enceinte. Quand elle se vit enceinte, elle regarda sa maîtresse avec mépris. 5  Et Saraï dit à Abram:
L'outrage qui m'est fait retombe sur toi. J'ai mis ma servante dans ton sein; et, quand elle a vu qu'elle était enceinte, elle m'a regardée avec mépris. Que le SEIGNEUR soit juge entre moi et toi !
6 Abram répondit à Saraï: Voici, ta servante est en ton pouvoir, agis à son égard comme tu le trouveras bon. Alors Saraï la maltraita; et Agar s'enfuit loin d'elle.

Comment entrer dans cette histoire scandaleuse où, parce que la pauvre Saraï n’a pas d’enfants, son mari va vers une autre ? Spontanément, c’est impossible, surtout si on est femme... Peut-être vaut-il pourtant la peine de regarder de plus près ce que dit le récit, en commençant par les paroles de Saraï à Abram : « Va donc vers ma servante, peut-être que par elle j’aurai un fils » : ce qui domine ici est bien l’espérance ! La suite le confirme : la honte de Saraï ne sera pas d’avoir été « trompée » par son mari, mais que sa servante la méprise pour sa stérilité.
Ce dont témoigne ce texte de façon émouvante, c'est de l'obsession de descendance.

La situation dant laquelle se trouve Saraï n’est pas propre à Israël : bien des siècles auparavant, Hammurapi régule les pratiques à Babylone :

« Si un homme a pris une prêtresse et si elle a livré une esclave à son mari et si celle-ci a mis au monde des enfants, si dans la suite cette esclave a voulu se tenir sur un pied d’égalité avec sa maîtresse, comme elle a mis au monde des enfants, sa maîtresse ne pourra pas la vendre ; elle lui (ré)imposera la marque de servilité et la comptera avec les esclaves. »
« Si elle n’a pas mis d’enfants au monde, sa maîtresse pourra la vendre. »

[D’après Le code de Hammurapi, A. Finet éd., Paris, Cerf, 1983, § 146-147]

7 L'ange du SEIGNEUR la trouva près d'une source d'eau dans le désert, près de la source qui est sur le chemin de Schur. 8 Il dit: Agar, servante de Saraï, d'où viens-tu, et où vas-tu? Elle répondit: Je fuis loin de Saraï, ma maîtresse. 9 L'ange du SEIGNEUR lui dit: Retourne vers ta maîtresse, et humilie-toi sous sa main.
10 L'ange du SEIGNEUR lui dit: Je multiplierai ta postérité, et elle sera si nombreuse qu'on ne pourra la compter.

11 L'ange du SEIGNEUR lui dit: Voici, tu es enceinte, et tu enfanteras un fils, à qui tu donneras le nom d'Ismaël; car le SEIGNEUR t'a entendue dans ton affliction. 12 Il sera comme un âne sauvage; sa main sera contre tous, et la main de tous sera contre lui; et il habitera en face de tous ses frères.

13 Elle appela Atta El roï le nom du SEIGNEUR qui lui avait parlé; car elle dit: Ai-je rien vu ici, après qu'il m'a vue? 14 C'est pourquoi l'on a appelé ce puits le puits de Lachaï roï; il est entre Kadès et Bared.

15 Agar enfanta un fils à Abram; et Abram donna le nom d'Ismaël au fils qu'Agar lui enfanta. 16 Abram était âgé de quatre-vingt-six ans lorsqu'Agar enfanta Ismaël à Abram.

L'Ange du Seigneur

Nicolas Colombel, Agar et Ismaël dans le désert (Magyar Szépmüvészeti Múzeum, Budapest - Yorck Project)Qui est cet ange du Seigneur qui apparaît plusieurs fois dans l’Ancien Testament ? Qui est-il par rapport à Dieu ?
En général, ses apparitions sont si soudaines qu’il est difficile de le différencier de Dieu lui-même. Parfois c’est véritablement le Seigneur qui semble parler par son ange : ‘je multiplierai ta descendance’ promet-il à Hagar... mais qui pourrait multiplier la descendance sinon Dieu ?

En fait, l’homme de la Bible sait bien que nul ne peut voir Dieu sans mourir (Ex 33,20) d’une part. En outre, par respect pour le Seigneur, on hésite souvent à mentionner une intervention directe de Dieu auprès de l’homme, même si les auteurs bibliques ont conscience qu’il s’est manifesté de façon visible. C’est alors qu’ils mentionnent l’ange du Seigneur. Le mot lui-même ne signifie rien d’autre que messager ; et c’est bien cela dont se charge l’ange du Seigneur : délivrer un message de la part de Dieu.

171 Lorsque Abram fut âgé de quatre-vingt-dix-neuf ans, le SEIGNEUR apparut à Abram, et lui dit: Je suis le Dieu tout puissant. Marche devant ma face, et sois intègre. 2 J'établirai mon alliance entre moi et toi, et je te multiplierai à l'infini.

3 Abram tomba sur sa face; et Dieu lui parla, en disant:

4 Voici mon alliance, que je fais avec toi. Tu deviendras père d'une multitude de nations. 5 On ne t'appellera plus Abram; mais ton nom sera Abraham, car je te rends père d'une multitude de nations.  Je te rendrai fécond à l'infini, je ferai de toi des nations; et des rois sortiront de toi. 7 J'établirai mon alliance entre moi et toi, et tes descendants après toi, selon leurs générations: ce sera une alliance perpétuelle, en vertu de laquelle je serai ton Dieu et celui de ta postérité après toi. 8 Je te donnerai, et à tes descendants après toi, le pays que tu habites comme étranger, tout le pays de Canaan, en possession perpétuelle, et je serai leur Dieu.

9 Dieu dit à Abraham:

Toi, tu garderas mon alliance, toi et tes descendants après toi, selon leurs générations. 10 C'est ici mon alliance, que vous garderez entre moi et vous, et ta postérité après toi: tout mâle parmi vous sera circoncis. 11 Vous vous circoncirez; et ce sera un signe d'alliance entre moi et vous. 12 A l'âge de huit jours, tout mâle parmi vous sera circoncis, selon vos générations, qu'il soit né dans la maison, ou qu'il soit acquis à prix d'argent de tout fils d'étranger, sans appartenir à ta race. 13 On devra circoncire celui qui est né dans la maison et celui qui est acquis à prix d'argent; et mon alliance sera dans votre chair une alliance perpétuelle. 14 Un mâle incirconcis, qui n'aura pas été circoncis dans sa chair, sera exterminé du milieu de son peuple: il aura violé mon alliance.

Jacques-Joseph Tissot, La promesse de Dieu à Abram (Jewish Museum, New York - Public domain)

Décrypter le texte

C’est ici la troisième fois que le Seigneur propose son Alliance à un patriarche, après Noé en Gn 9 et Abraham en Gn 15. C’est en comparant ces épisodes que le lecteur fûté découvre les caractéristiques essentielles de l’Alliance avec Dieu :

  • Les partenaires de Dieu : adressée à un seul un homme d’abord, l’alliance le débordera pour être bénédiction pour tous ceux qui se rattachent à lui de quelque façon.
  • La parole du Seigneur signifie qu’il veut contracter une alliance avec l’homme, mais elle énonce aussi ce que sera celle-ci : Dieu s’engage.
  • Un signe : l’arc-en-ciel pour Noé et tous les habitants de la terre ; les étoiles comme signe de sa nombreuse descendance pour Abraham (15,5). Ici, la circoncision, marque personnelle, qui unit l’homme à son Dieu. Une alliance a besoin de signes...
  • Une célébration de l’Alliance (Gn  15) peut solenniser sa conclusion.

Merveilleuse pédagogie de Dieu : jusqu'ici, l’alliance s’adressait à Abraham et par lui à toutes les nations. Maintenant, voici qu’elle vient rejoindre chacun de ceux qui l’accepteront. Avec la circoncision, c’est le passage à une relation particulière de chacun avec son Seigneur.

15 Dieu dit à Abraham:

Tu ne donneras plus à Saraï, ta femme, le nom de Saraï; mais son nom sera Sara. 16 Je la bénirai, et je te donnerai d'elle un fils; je la bénirai, et elle deviendra des nations; des rois de peuples sortiront d'elle.
17 Abraham tomba sur sa face; il rit, et dit en son coeur: Naîtrait-il un fils à un homme de cent ans ? et Sara, âgée de quatre-vingt-dix ans, enfanterait-elle ? 18 Et Abraham dit à Dieu : Oh! qu'Ismaël vive devant ta face! 19 Dieu dit: Certainement Sara, ta femme, t'enfantera un fils; et tu l'appelleras du nom d'Isaac. J'établirai mon alliance avec lui comme une alliance perpétuelle pour sa postérité après lui.
20 A l'égard d'Ismaël, je t'ai exaucé. Voici, je le bénirai, je le rendrai fécond, et je le multiplierai à l'infini; il engendrera douze princes, et je ferai de lui une grande nation. 21 J'établirai mon alliance avec Isaac, que Sara t'enfantera à cette époque-ci de l'année prochaine. 22 Lorsqu'il eut achevé de lui parler, Dieu s'éleva au-dessus d'Abraham.

A chaque fois, le Seigneur donne au-delà de la demande de l’homme. En Gn 15,3, Abraham se plaignait, mais acceptait l’idée de transmettre ses biens à un homme qui ne soit pas de son sang, et le Seigneur lui assure qu’il aura un héritier ‘qui sortira de tes entrailles’. Ici, Abraham se satisferait d’Ismaël, le fils de la servante, c’est Dieu qui veut lui donner davantage : un fils de la femme qu’il aime, Sara. Mais cela n’enlèvera rien à la bénédiction qui touche Ismaël : le don de Dieu est irrévocable.

23 Abraham prit Ismaël, son fils, tous ceux qui étaient nés dans sa maison et tous ceux qu'il avait acquis à prix d'argent, tous les mâles parmi les gens de la maison d'Abraham; et il les circoncit ce même jour, selon l'ordre que Dieu lui avait donné. 24 Abraham était âgé de quatre-vingt-dix-neuf ans, lorsqu'il fut circoncis. 25 Ismaël, son fils, était âgé de treize ans lorsqu'il fut circoncis. 26 Ce même jour, Abraham fut circoncis, ainsi qu'Ismaël, son fils. 27 Et tous les gens de sa maison, nés dans sa maison, ou acquis à prix d'argent des étrangers, furent circoncis avec lui.

Et Dieu dans tout cela ?

Dieu est omniprésent ici, mais il y a bien des façons d’être présent et on peut se demander ce que le texte met en valeur du Seigneur : à travers ce qui est dit de lui, qu’est-il possible d’en dire ? Quatre observations s’imposent ici, quitouchent à la relation entre Dieu et les hommes :

  1. Dieu parle à l’homme, et parce qu’il en prend l’initiative : Dieu voit donc l’homme et celui-ci a du prix pour lui.
  2. Cette parole de Dieu est avant tout bienveillante : elle veut le bien de celui auquel elle s’adresse.
  3. Dieu se présente d’abord comme celui qui perçoit la détresse [16,11]) : le malheur de l’homme ne lui est donc pas indifférent.
  4. Les prises de parole de Dieu n’ont pour but que de proposer son alliance aux hommes, alliances qui ne seront que bénédiction pour ce dernier : ainsi Dieu ne cesse d’attendre une réponse de l’homme...


Les droits de la femme

Ici, Saraï n’est que « la femme d’Abram », la femme de son mari. Est-elle stérile ? Non : elle est une femme qui n’a pas donné d’enfants à son mari ! Cependant, Saraï a des droits :

  • Non seulement, c’est elle qui forme le projet de donner sa servante – c’est-à-dire une esclave – à Abram pour suppléer à sa ‘défaillance’, mais elle choisit qui elle donnera à son mari : sa servante, c’est-à-dire un peu d’elle-même.
  • la servante n’a pas le droit d’oublier ce qu’est sa maîtresse pour elle et Abraham reconnaît ce droit – tout comme l’ange du Seigneur.

Alors ? Élémentaire ! Ce qui est en jeu ici, ce n’est pas la femme, c’est la nécessité de la descendance. Elle est ressentie à tous les niveaux : celui du mari chef de famille mais aussi celui de la femme. Saraï a-t-elle une autre possibilité que la voie qu’elle choisit ? Sans doute pas. En désire-t-elle une autre ? Il n’est pas sûr qu’elle se pose cette question qui est une question moderne. Saraï est simplement une femme de son époque pour qui avoir un enfant est une nécessité ; elle sait que, normalement, les enfants de sa servante seront ensuite considérés comme les siens, avec les mêmes droits...

La bénédiction

Bénir, c’est dire du bien, et parce que la Parole fait ce qu’elle dit, bénir une personne, n’est pas qu’en dire du bien, mais lui faire du bien.

L’objet de la bénédiction, c’est tout ce qui est puissance de vie et à qui une parole peut donner un surcroit de vie : donc l’homme et la femme, mais il faut se souvenir que la première bénédiction, lors de la Création, est celle des bêtes des mers et des cieux.

Puisque le désirable est la vie, de nombreuses bénédictions portent sur la fécondité, sous son double aspect, d’abord de la multiplicité : ‘soyez féconds et multipliez-vous’, mais aussi de la plénitude de vie.

Ce n’est pas seulement Dieu qui bénit, mais toute bénédiction vient de Dieu. Celui qui bénit fait appel à Dieu puisque c’est lui qui donnera.

Puisque la bénédiction opère ce qu’elle dit, il est du devoir de celui qui en a le pouvoir de la donner. C’est la dernière obligation du patriarche avant de mourir : donner sa bénédiction qui sera ratifiée par Dieu et qui s’étend toujours au-delà de la simple personne qui la reçoit. Malheur alors à celui qui ne sera pas là pour la recevoir.

Pour réfléchir...

  • Ces textes dépeignent des attentes de descendance de l’homme et de la femme. Comment différencierai-je :
    • l’attente de Sara ?
    • l’attente d’Abraham ?
  • Quand je regarde la façon dont le Seigneur se présente, à laquelle suis-je le plus sensible ? pourquoi ?

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